in Benjamin Constant, De la Religion, Bibliothèque Romande , 1971, p. 43
Il y a des lois pour nous garantir de la violence.
Il y a des gouvernements chargés de maintenir ces lois, et qui, bien ou mal, s’en acquittent. Il y a des supplices pour ceux qui les enfreignent. Il y a du luxe, des raffinements, des plaisirs pour le riche. Il y a des sciences pour nous expliquer les phénomènes qui nous entourent, et pour détourner ceux qui nous menacent. Il y a des médecins pour les maladies. Quant à la mort, c’est un accident inévitable, il est superflu de s’en occuper. Tout n’est-il pas merveilleusement arrangé pour l’homme ? Quel besoin cet arrangement laisse-t-il sans le satisfaire ? Quelle crainte sans la calmer ? Où donc est la cause extérieure qui nous rend la religion nécessaire ? Elle l’est pourtant, nous le sentons, les uns toujours, les autres par intervalles. C’est que cette cause n’est pas hors de nous : elle est en nous, elle fait partie de nous-mêmes.